LE CHIFFRE
C’est le numéro de l’article de la loi de finances pour 2024 qui pose les bases du nouveau système de redevances des C’est le numéro de l’article du Code de la sécurité intérieure (partie législative) qui impose aux services d’eau et d’assainissement de prévoir les mesures nécessaires au maintien de la satisfaction des besoins prioritaires de la population lors des situations de crise.
Il est complété par plusieurs dispositions réglementaires (notamment art. R.372-1 et s.) qui chargent les exploitants de ces services d’élaborer un plan interne de crise (PIC) qui organise notamment le fonctionnement du service en mode dégradé afin d’assurer en toutes circonstances la satisfaction des besoins prioritaires.
Cet objectif requiert au préalable de définir les populations vulnérables (individus, établissements de santé, entreprises…), de déterminer leurs besoins, de les identifier parmi les usagers du service… et de tenir à jour les données correspondantes. En cascade, tout cela renvoie également à des enjeux de collecte, de traitement (RGPD), de sécurité informatique, etc.
La démarche d’élaboration du PIC recoupe par certains aspects celle du PGSSE (ex : recensement des risques), qui doit être élaboré avant le 12/07/2027 pour le volet captage et avant le 12/01/2029 pour le volet production et distribution.
L’ARRÊT
Quelles suites donner à une demande d’extension de réseau d’eau public visant à desservir une habitation isolée ? Les services d’eau sont couramment confrontés à cette question ; elle est même récurrente dans les territoires où la pression sur la ressource est devenue permanente depuis quelques années.
La CAA de Lyon vient de se prononcer (CAA Lyon 29/05/2024, n°22LY02143) sur un tel dossier, en appliquant la grille d’analyse fixée en 2021 par le Conseil d’Etat (CE 26/01/2021, n°431494) pour ce type de contentieux, qui repose sur une approche au cas par cas. Cette décision est très illustrative.
Ici, le propriétaire contestait le refus de raccordement opposé par la collectivité ; pour trancher ce litige, la CAA a procédé en 3 temps.
A. Exposé des faits : la parcelle est alimentée en eau potable depuis un réservoir public par une canalisation privée. Elle est située en zone naturelle du PLU, au sein d’une zone boisée, non constructible, en dehors des zones de desserte définies dans le schéma de distribution et à l’écart de toute autre habitation susceptible de bénéficier d’un raccordement au réseau d’eau potable.
B. Examen de la situation au regard des 3 critères fixés par le Conseil d’Etat :
- coût des travaux : investissement compris entre 75 000 et 150 000 € selon les devis produits (distance > 1,7 km entre le fonds du réservoir d’eau potable le plus proche, géologie défavorable) ;
- intérêt public : montant qualifié de « hors de proportion » avec la desserte d’une seule parcelle construite ;
- conditions d’accès à d’autres sources d’alimentation : le caractère insuffisant de l’alimentation en eau de cette propriété par la canalisation privée la desservant actuellement n’est ici pas démontré par le requérant.
C. Conclusion : l’analyse de la collectivité sur les 3 critères est validée : elle n’a pas commis « d’erreur manifeste d’appréciation de la situation ». Le refus de raccordement est donc fondé.
Dans leur pratique, c’est évidemment la même démarche que doivent suivre les services d’eau sollicités, afin de sécuriser le mieux possible leurs décisions sur le plan juridique.
Par ailleurs, dans son arrêt de 2021, le CE a indiqué :
- que ces dossiers devront être examinés « notamment » au regard des 3 critères utilisés par la CAA : le cas échéant, les juges pourront éventuellement tenir compte d’autres aspects, en fonction des circonstances ;
- que lorsqu’ils seront saisis, les juges vérifieront uniquement si la collectivité a commis une « erreur manifeste d’appréciation » lors de l’analyse du dossier : celle-ci étant relativement discrétionnaire, le juges ne procéderont pas à une nouvelle instruction complète du dossier mais s’assureront seulement que collectivité ne s’est pas trompée grossièrement dans l’appréciation des faits qui ont motivé sa décision ;
- que l’analyse des demandes de raccordement « en 3 critères » menée par la CAA concernera 2 cas de figure : dans les collectivités dotées d’un schéma de distribution elle s’appliquera uniquement aux dossiers situés comme ici en dehors des zones de desserte ; dans les collectivité ne disposant pas de schéma, elle concernera la totalité des dossiers.
Rappelons enfin que d’une part l’échéance légale pour l’établissement de ce document est le 31/12/2024 (ou 2 ans plus tard pour les CC qui deviendront compétentes en 2026) et que d’autre part le CE a indiqué dans ce même arrêt que dans les zones de desserte l’obligation de raccordement est générale.rt du service d’eau (en l’occurrence : simple information verbale) : cf. CCass 21/03/2018, n°17-13.031.
Comment se situe la compétence « défense extérieure contre l’incendie » dans le contexte intercommunal ?
La défense extérieure contre l’incendie (DECI), dont l’objet est d’assurer, en fonction des besoins résultant des risques à prendre en compte, l’alimentation en eau des moyens des services d’incendie et de secours, présente plusieurs caractéristiques majeures à prendre en compte dans une perspective intercommunale.
Tout d’abord, il s’agit d’une compétence à part entière : bien qu’elle soit techniquement étroitement imbriquée à la compétence « eau potable », elle en est juridiquement totalement distincte. Elle fait d’ailleurs l’objet d’un cadre juridique spécifique posé aux art. L.2225-1 et s. du CGCT.
Conséquence de l’autonomie juridique de la DECI : son transfert n’est pas lié à celui de la compétence « eau potable », sauf dans les métropoles et CU pour lesquelles il s’agit d’une compétence obligatoire.
Par ailleurs, la DECI est une compétence atypique, qui présente une « double dimension » :
- il s’agit d’une compétence opérationnelle, qui englobe la définition des moyens de défense, leur mise en place et leur maintien en état de fonctionnement, etc. (cf. art. L.2225-1 à 4 et R.2225-1 à 10 du CGCT) ;
- elle fait dans le même temps l’objet d’un pouvoir de police spéciale spécifique du maire, sous l’autorité duquel elle est placée (art. L.2213-32 du CGCT). A ce titre, l’art. R.2225-4 le charge notamment de prendre un arrêté pour identifier les risques et fixer la quantité, la qualité et l’implantation des points d’eau incendie identifiés pour l’alimentation en eau des moyens des services d’incendie et de secours, ainsi que leurs ressources (réseau d’AEP, eau de surface publique ou privée, sites de stockage…). L’outil complémentaire de cette obligation est le schéma de DECI : bien que facultatif, il permet, comme des schémas directeurs d’eau ou d’assainissement dans leurs domaines, d’engager une réflexion dynamique sur le sujet (ex : besoins actuels et futurs compte tenu de l’urbanisation) et de donner un fondement solide aux mesures prises dans l’arrêté.
Dans une perspective intercommunale, ces 2 dimensions se traitent séparément.
- Elles peuvent faire l’objet d’un transfert distinct, les communes pouvant ainsi ne confier que le volet opérationnel à leur EPCI : installation, entretien, maintenance… des équipements.
Lorsque le même EPCI détient la compétence « eau potable », le transfert de ce volet peut présenter un réel intérêt : réflexion globale sur le patrimoine, maîtrise par le service des interventions sur ses ouvrages, activité complémentaire à la gestion courante du réseau, etc.
Si seul ce volet est confié à l’EPCI, la réglementation de l’activité, traduction du pouvoir de police, demeure du ressort des maires, ce qui nécessite une bonne organisation entre niveau communal et intercommunal.
- La DECI fait partie des quelques domaines dans lesquels le pouvoir de police spéciale du maire peut être transférée au président de l’EPCI (art. L.5211-9-2 al.9).
Ce transfert ne peut toutefois intervenir qu’en complément de celui du volet « technique », et dans ce cas il n’est pas automatique : il requiert l’accord de tous les maires et du président de l’EPCI. Il est constaté par arrêté préfectoral (art. L.5211-9-2 IV).
Les missions associées à ce pouvoir sont les mêmes que celles confiées au maire lorsque la compétence reste communale : il y a totale substitution.
Point notable : depuis juillet 2023, ce transfert peut désormais être effectué également au profit du président d’un syndicat et non plus seulement d’un EPCI à fiscalité propre (art. L.5211-9-2 al. 10).
Autre caractéristique importante de la DECI : elle constitue un service public administratif (SPA) relevant du budget principal. Conséquence directe : les usagers du service d’eau n’ont pas à supporter sur leurs factures les surcoûts induits par l’imbrication technique entre les 2 compétences, notamment lorsque des ouvrages d’eau sont surdimensionnés pour intégrer la dimension « incendie ». Le CGCT est d’ailleurs très clair sur ce point :
- d’une part l’art. L.2225-3 pose le principe général selon lequel « Lorsque l’approvisionnement des points d’eau visés aux articles L. 2225-1 et L. 2225-2 fait appel à un réseau de transport ou de distribution d’eau, les investissements afférents demandés à la personne publique ou privée responsable de ce réseau sont pris en charge par le service public de défense extérieure contre l’incendie » ;
- d’autre part l’art. R.2225-8 précise que « Les investissements correspondant à ces ouvrages, travaux et aménagements sont pris en charge par le service public de défense extérieure contre l’incendie selon des modalités déterminées par une délibération dans le cas où la même personne publique est responsable du réseau d’eau et est compétente pour cette défense ; par une convention dans les autres cas. »
En pratique, ce cloisonnement est peu fréquent lorsque les compétences « eau » et DECI sont communales, et on constate généralement une certaine porosité budgétaire…
Lorsque la compétence « eau » est transférée, ces arrangements peuvent difficilement se poursuivre : outre leur illégalité, l’EPCI est peu enclin à assumer ce type de charges qui ne sont pas de son ressort. L’impact peut alors être important pour les communes : cette compétence qui jusqu’alors « ne coûtait rien ou pas grand-chose » doit être prise en charge par le budget principal.
Si la compétence DECI est transférée à une communauté, le mécanisme des attributions de compensation est mobilisé afin de compenser le transfert de charges que cela entraîne (art. 1609 nonies C IV CGI). Toutefois, plus la part des coûts de la DECI supportée jusqu’alors par le service d’eau était importante, plus il va s’avérer délicat de les reconstituer. Il faut alors utiliser des ratios afin d’approcher au mieux la charge transférée, faute de quoi la communauté est fortement pénalisée, d’autant que l’expérience montre que les besoins de financement pour la DECI sont généralement importants et qu’elle ne dispose d’aucune recette associée (situation en tous points similaire à celle qui prévaut pour la compétence gestion des eaux pluviales urbaines).
Enfin, quelle que soit la répartition des compétences eau et DECI, les consommations d’eau pour celle-ci sont le seul usage de l’eau potable qui bénéficie de la gratuité (art. L.2224-12-1 CGCT). Cela concerne uniquement l’eau prélevée sur les bouches et poteaux d’incendie placés sur le domaine public : la défense incendie privée (ex : assurée par une entreprise dans ses installations) ne bénéficie pas de ce régime.
Quelles informations le service d’eau doit-il fournir à ses nouveaux abonnés lors de leur souscription ?
De plus en plus d’aspects de la relation service d’eau / abonné sont désormais encadrés par le droit de la consommation ; tel est notamment le cas de l’établissement de l’abonnement.
Malgré ses particularités, notamment l’absence de concurrence entre distributeurs pour le nouvel abonné, le contrat de fourniture d’eau est assimilé par de nombreux aspects aux contrats d’abonnement téléphonique, de fourniture d’électricité ou de vente en ligne.
Ainsi, le Code de la consommation impose au service d’assurer une information précontractuelle complète (art. L.111-1 et s.) : caractéristiques essentielles du bien fourni, prix, possibilité d’accès au médiateur… La liste des informations à fournir est abondante et certaines sont sans objet pour l’eau potable (ex : frais d’envoi à la charge du consommateur en cas de rétractation…).
Pour répondre à cette obligation, le plus simple est certainement de remettre à tout nouvel abonné une fiche récapitulant les éléments visés : informations administratives (coordonnées du service…), éléments-clés de la grille tarifaire (ex : prix de l’abonnement et du m3 et renvoi à un document plus complet –ex : le règlement de service– pour le détail de tous les tarifs : branchement neuf, interventions à la demande…), information sur l’existence du médiateur et coordonnées, etc.
Ces informations doivent être fournies quelles que soient les modalités de souscription, sur place dans les locaux du service ou en ligne sur sa plateforme numérique.
En complément, des obligations spécifiques s’appliquent lors d’une souscription à distance :
- Information du nouvel abonné quant aux implications de la souscription du contrat : confirmation du contrat et formulaire type de rétractation. Ces éléments lui sont remis sur « un support durable » : au vu de la jurisprudence, cela peut notamment prendre la forme d’un fichier pdf envoyé par mail ou de sa mise à disposition dans l’espace personnel de l’abonné sur la plateforme du service (sous réserve de l’en informer explicitement). A l’inverse, un lien vers une page web ne répond pas à ces exigences, le caractère « durable » des informations figurant sur la page n’étant alors pas garanti
L’art. L.221-14 précise en outre que le service doit s’assurer que le nouvel abonné a bien compris son obligation de paiement dès lors qu’il souscrit un abonnement : il peut par exemple lui être proposé de cocher une case à cet effet, accompagnée d’un texte explicite.
Le nouvel abonné doit également se voir offrir la possibilité de demander le démarrage immédiat (ou dans un délai court, inférieur au délai de rétractation) de la fourniture d’eau. La validation définitive de cette option est conditionnée à l’expression claire de la compréhension de ses implications : fourniture immédiate ou à une date très proche, existence malgré tout du droit de rétractation pendant 14 j, engagement à payer le service fourni en cas d’exercice de ce droit. Ici encore, une case à cocher ou une fenêtre pop up semblent adaptées.
- Information claire sur le droit à rétractation (art. L.221-5 7° ; art. R.221-1 et s.) : présentation de ce droit, de ses implications et de la façon de l’exercer. Le Code fournit pour cela des modèles de notice d’information et de formulaire type… tout en rappelant que la rétractation peut s’effectuer sur tout autre support du moment qu’elle est faite « au moyen d’une déclaration dénuée d’ambiguïté ». Bien que la notion de rétractation paraisse surréaliste pour un contrat de fourniture d’eau potable, ce cadre juridique s’impose à tous les services dès lors qu’ils proposent des souscriptions à distance.
Outre ces diverses informations, qui relèvent des obligations générales, la souscription de l’abonnement est l’occasion pour le service de remettre le règlement de service à tout nouvel abonné, physiquement ou par voie électronique, le rendant ainsi opposable, ainsi que les documents relatifs au prélèvement automatique voire à la mensualisation. Dans ce cas, le contrat à signer intégrera utilement la liste des documents fournis lors de la souscription, dont ledit règlement : cela pourra s’avérer utile en cas de contestation ultérieure relative à sa communication et donc son opposabilité.
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